Tour d’Italie – La triche est consubstantielle à l’homme à vélo, en voiture et à moto. Le “bidon-motorisé” a remplacé la poussette organisée des années 1960

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[publié le 25 mai 2017]

Dans l’ascension du troisième obstacle de l’étape-reine du 100e Giro, à 4 km du passage au col de l’Umbrail (2 502 m), on a vu Vincenzo Nibali et Nairo Quintana se débarrasser d’Ilnur Zakarin et de Domenico Pozzovivo grâce au concours des motos de la télévision italienne. Moi-même devant l’écran, j’avais noté la collaboration –  des deux roues motorisées en ponctuant : ‘’Ce n’est pas possible !’’ Cet incident a été vécu avec exaspération par Domenico Pozzovivo, l’un des acteurs floués.

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Tour d’Italie 1960 : Gastone Nencini grimpe le Gavia (2618 m) grâce à une chaîne de supporters qui, de main en main, le propulse au sommet

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La poussette a été remplacée par le bidon-motorisé ou bidon-collé

 

Avant la poussette était omniprésente dans les courses à étapes. Aujourd’hui, mais déjà depuis quelques années, avec la permission de se ravitailler auprès des voitures d’équipe, on assiste – notamment dans les ascensions – au ballet incessant des coureurs venant se ravitailler en barres énergétiques et bidons « motorisés ». La technique consiste à bien agripper avec la main l’objet (bidon…) tenu fermement par le conducteur de la voiture qui, en même temps, accélère plus ou moins longtemps. Cette pratique n’a pas cours sur le plat, ni a fortiori en descente ni avec la moto fraîcheur.

D’ailleurs, le réalisateur de la RAI – la télévision italienne – sent bien que cette technique du ‘’bidon- motorisé’’ transgresse les règles éthiques car dès qu’il constate sur les écrans que la triche est trop visible (un coureur agrippé au bidon-motorisé pendant un bon moment), il bascule sur une autre caméra montrant une autre partie de la course.

Si on ne veut pas que la dérive s’intensifie avec de plus en plus de ‘’bidons-motorisés’’ sur des centaines de mètres, il faut que les commissaires de course fassent leur job en pénalisant à la fois les directeurs sportifs et les bénéficiaires.

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Luca Paolini et la Katusha réalisent ici un exemple de bidon-collé. C’était il y a au moins deux ans et la technique ascensionnelle du bidon-motorisé est toujours dans l’actualité du Giro 2017 (Photo : archives AFP)

Pour que le cyclisme ne devienne pas le foot où la triche est omniprésente : tirage de maillot, entrave de l’adversaire avec les bras (voire le ceinturer), croche-pied, tacle par derrière, etc. aboutissant depuis plusieurs années à la triste réalité que les footballeurs ne peuvent plus se comparer à des manchots, les bras ayant acquis, avec la permission des Fédérations et des arbitres, autant d’importance que les membres inférieurs.

 

Tour d’Italie – La chaîne l’Equipe brille par ses scores d’audiences mais beaucoup moins par les commentaires de ses envoyés spéciaux

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C’est grâce à ses champions que le vélo attire toujours autant de spectateurs et de téléspectateurs. L’Equipe, dans son édition du 25 mai s’en glorifie en titrant un articulet dans la page Extra médias « Journée record pour la chaîne L’Equipe »

 

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L’Equipe, 25 mai 2017

 

Tout le milieu cycliste sait que je m’intéresse aux compétitions depuis le début des années 1970. La 100e édition du Giro ne pouvait me laisser indifférent, notamment sa 16e étape phare du  23 mai entre Rovetta et Bormio avec le Mortirolo (1 854 m) et la double ascension du Stelvio (2 758 et 2 502 m). Curieusement, l’arrêt précipité du maillot rose Tom Dumoulin dans la deuxième ascension du Stelvio (l’Umbrailpass le versant suisse) a été escamoté par les envoyés spéciaux de L’Equipe sur la course.

De même, pendant le commentaire du direct, on a eu droit à partir de l’arrêt impromptu du maillot rose, au diagnostic de ‘‘problèmes liés à l’estomac ou troubles gastriques’’.

Résumons les faits : Dumoulin, prit d’une envie pressante, s’arrête sur le bord de la route, jette son vélo, retire son maillot de leader, baisse son cuissard pour satisfaire ‘’un gros besoin naturel’’.

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Tom Dumoulin obligé de s’arrêter pour satisfaire un gros besoin naturel (capture d’écran de la chaîne L’Equipe)

L’opération va prendre un peu moins d’une minute. Livré à lui-même, quasiment seul pendant les 30 derniers kilomètres, le leader de l’équipe Sunweb réalise un exploit en ne perdant que deux minutes sur Vincenzo Nibali et Nairo Quintana ces deux principaux adversaires pour le général. Chapeau l’artiste !

Pour en revenir à cet incident de transit, rappelons aux commentateurs de la chaîne L’Equipe que lorsque c’est l’estomac qui est patraque, l’évacuation se fait par voie haute (bouche et donc vomissement) alors que lorsque l’intestin manifeste son désaccord (accélération du transit) c’est par le rectum que la sortie s’effectue.

Donc, de nous assommer avec des troubles de l’estomac alors qu’en réalité c’est l’intestin qui est en cause (sécrétions hydriques intestinales exagérées) montre l’étendue de l’ignorance du fonctionnement du corps par les spécialistes de la chaîne L’Equipe.

Quelques minutes avant cet incident digestif, somme toute lourd de conséquences, on a vu à l’écran Dumoulin se tenir à la portière de sa voiture tout en discutant pendant quelques instants avec son directeur sportif. Etait-il en train – car il sentait déjà les prémices des troubles digestifs – de lui demander conseil sur la conduite à tenir ? On ne sait pas puisque la question ne lui a pas été posée …