En raison de l’inefficacité des contrôles antidopage, seuls les retardataires et les ignorants se font prendre par la patrouille. Dès le début des années 1970, un médecin avait stigmatisé les grosses carences des tests antidopage

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Publié le 06 décembre 2016

C’est dans Cyclisme magazine, publication à laquelle j’ai collaboré de 1973 à 1979, que le journaliste Pierre Chany, leader de la rubrique cyclisme à L’Equipe mais aussi intervenant dans le mensuel du vélo, signalait dans le numéro 41 du 06 octobre 1971,

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qu’un disciple d’Esculape très au fait des arcanes des analyses biologiques (mais impossible de retrouver son nom !) affirmait naguère à son confrère Abel Michéa de L’Humanité : « Ceux qui se font prendre dans ces contrôles sont des retardataires ou des ignorants. »

 

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Cyclisme Magazine n° 41, 06 octobre 1971, p 13

 

Vingt-cinq ans plus tard, au moment des Jeux olympiques de Barcelone en 1992, le prince belge Alexandre de Mérode, président de la Commission médicale du Comité international olympique (CM-CIO) depuis 1967 ouvrait enfin les yeux après de multiples discours langue de bois du style : « Les Jeux de Moscou ont été les plus propres ».

 

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Langue de bois ”à fermeture éclair”

 

Dans L’Equipe du 14 août 1992 il admettait enfin que « seuls les plus stupides ou les plus imprudents se font prendre aux tests antidopage ». Belle lucidité !

A partir de cette punchline mérodesque, le quotidien sportif français va régulièrement faire du prince belge l’inventeur de ladite phrase. Sauf, et nous l’avons vu, que de Mérode n’était pas le premier à faire ce constat accablant ni le deuxième, ni le troisième mais… le quatrième. En effet, deux piliers de la lutte antidopage avant de Mérode, avaient stigmatisés l’impuissance des analyses d’urine pour épingler les tricheurs :

Robert Dugal (CAN), chef du laboratoire MRS Santé à Montréal de 1975 à 1992 : « Seuls les athlètes négligents et mal conseillés se sont fait prendre, lors des tests antidopage effectués aux compétitions. »

 

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Robert Dugal, patron du labo antidopage de Montréal de 1975 à 1992

 

[Rapport C.L. Dubin .- Commission d’enquête sur le recours aux drogues et autres pratiques interdites pour  améliorer la performance athlétique .- Ottawa (CAN), éd.  Centre d’édition du gouvernement du Canada.  Approvisionnements et services Canada, 1990 .- 714 p (p 445)]

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Commission d’enquête sur le dopage organisée par le Gouvernement canadien à la suite du contrôle positif de l’athlète Ben Johnson, déchu de son titre au 100 m des JO 1988

Sir Arthur Gold (GBR), Président de la British Olympic Association : « Tant que le dépistage sera ce qu’il est, nous n’attraperons que les imprudents et les mal-conseillés. » [Rapport C.L. Dubin .- Commission d’enquête sur le recours aux drogues et autres pratiques interdites pour  améliorer la performance athlétique .- Ottawa (CAN), éd.  Centre d’édition du gouvernement du Canada.  Approvisionnements et services Canada, 1990 .- 714 p (p 393)]

Au final, et contrairement à ce que racontent les ‘’historiens’’ du dopage, ce n’est donc pas de Mérode le premier à avoir, avec une telle concision, résumé le flop des contrôles des drogues de la performance. Ajoutons que, sans faire preuve de mauvais esprit, cette punchline est toujours d’actualité.

 

 

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