COVID-19 – La chloroquine fait causer la presse à tort et à travers

Par défaut

Nous vous proposons l’histoire de deux champions cyclistes, Raphaël Geminiani et Fausto Coppi qui, lors d’une compétition en Afrique de l’Ouest, sont tous deux contaminés par un parasite provoquant le paludisme.

Le premier soigné à la Nivaquine (chloroquine) s’en sort mais le second traité à la cortisone ne peut être sauvé.

Méfaits sportifs des corticoïdes

Par défaut

Glissades et tacles incontrôlés

 La cortisone est une hormone sécrétée par la zone corticale, située à la périphérie des glandes surrénales. On fabrique à des fins thérapeutiques des dérivés de synthèse de la cortisone, regroupés avec elle sous l’appellation de « glucocorticoïdes ou glucocorticostéroïdes ». Depuis l’introduction dans l’arsenal médical des hormones cortico-surrénales et de leurs dérivés de synthèse, leur champ d’application n’a fait que croître au même titre que les spécialités pharmaceutiques s’en réclamant. Les corticoïdes sont des drogues polyvalentes dont l’usage est tentant pour le thérapeute, notamment dans le domaine anti-inflammatoire, mais cette médaille a son revers, et un revers hors du commun.

Peu de drogues sont capables de tels effets salutaires et en même temps responsables d’accidents aussi sérieux que divers ! Les corticoïdes possèdent plusieurs propriétés : c’est de l’exagération de ces propriétés que naissent les accidents thérapeutiques. Tout d’abord, l’action anti-inflammatoire entraîne un certain nombre de complications viscérales et infectieuses dont la survenue peut être précoce, en particulier chez certains sujets prédisposés. Ensuite, l’introduction d’un composé hormonal, même à des doses thérapeutiques, réalise un état artificiel d’hyperimprégnation et cette hormone médicamenteuse interfère dans l’équilibre de toutes les hormones de l’organisme et le perturbe. Malgré ces risques, les sportifs les consomment pour leurs effets antifatigue, euphorisant et, bien sûr, anti-inflammatoire.

Le cas exemplaire, en 1979, du basketteur Bill Walton résume bien les dérives de la médicalisation intensive de la performance.

 1965  – Dr Kaare Rodahl : « Les corticostéroïdes affectent les protéines contractiles du muscle »

Per-Olof Astrand et Kaare Rodahl, professeurs de physiologie : « Lors d’études très précises de l’équilibre métabolique, au cours desquelles étaient étudiées sur l’homme jeune, en bonne santé, les effets de l’administration quotidienne de 20 à 40 mg de triamcinolone (Kénacort®  – Labo Squibb -) sur la force musculaire, l’équilibre azoté et le poids corporel, on a pu montrer que l’administration de corticoïdes détermine une augmentation de l’équilibre urinaire d’azote, une perte de poids et une diminution de la force musculaire. (Rodahl et coll., 1965). En administrant simultanément des agents anabolisants tels que la méthyltestostérone, il est possible de réduire ces modifications, mais non de les annuler. Ceci montre que chez l’homme, les processus cataboliques que provoque le traitement par les corticostéroïdes affectent les protéines contractiles du muscle. » [Astrand P.O. et Rodahl K. .- Effets des agents anabolisants et antianabolisants in “Manuel de physiologie de l’exercice musculaire” .- Paris, éd. Masson, 1973 .- 606 p (p 88)]

 1967  – Sensation de fatigue et insuffisance surrénalienne : pas de rapport !

Georges Le Moan, professeur de pharmacologie à Paris : « Assimilant abusivement la sensation de fatigue à une insuffisance corticosurrénalienne, certains ont préconisé l’emploi d’hormones sécrétées par cette glande (minéralocorticoïdes, glucocorticoïdes) ou susceptibles d’en augmenter la sécrétion (ACTH). En fait, pour qui connaît la subtilité des interactions hormonales, les insuffisances surrénaliennes qu’elles peuvent créer, les contre-indications de leur emploi, une telle pratique est extrêmement dangereuse. Signalons qu’au cours des traitements prolongés, elles peuvent provoquer des syndromes d’excitations psychiques. Ces hormones sont inscrites au tableau A. Leur emploi chez les sportifs, sauf nécessité thérapeutique, doit donc être rigoureusement interdit. » [Le Moan G. .- Le dopage des intellectuels et des sportifs .- Prod. et Prob. Pharm., 1967, 22, n° 1, janvier, pp 5-15 (p 10)]

 1975  – HALTÉROPHILIE – Le drame de Kaarlo Kangasniemi (Finlande)

Témoignage de Kaarlo Kangasniemi : « Médaillé d’or aux JO de Mexico en 1968, améliorant 17 records mondiaux dans trois catégories différentes de 1968 à 1972, le Finnois est victime en 1975 d’une surdose d’anabolisants et de corticoïdes : « Durant les années qui précédèrent mon titre olympique, je soulevais entre 50 et 70 tonnes par semaine, c’est-à-dire de 2 500 à 3 500 tonnes de fonte par an. C’était fou. Au printemps 1968, souffrant des muscles abdominaux et sur les conseils d’un médecin, j’ai commencé à prendre des anabolisants. Deux cachets par jour, suivis d’une injection intramusculaire. Ce traitement me permit de guérir vite et je me sentais beaucoup plus fort. L’engrenage infernal commençait et, des années durant, j’ai continué à jouer avec mon poids sans personne pour me conseiller puisque j’étais mon propre entraîneur. Ce furent ensuite les blessures à répétition et les opérations. On me traita après à la cortisone et… le drame se produisit à l’automne 1975. D’un côté, les anabolisants m’avaient doté d’une masse musculaire trop concentrée et, de l’autre, la cortisone avait fragilisé l’ossature. En plein effort, à Kajaali, alors que je tentais de soulever une barre à 160 kg, le muscle de l’omoplate gauche a éclaté et la barre m’est retombée d’abord sur la tête puis sur la nuque. J’ai perdu connaissance. Ma vie était foutue. J’étais paraplégique. »

 

kaarlo_kangasniemi

Kaarlo Kangasniemi

 

 Médaille d’or aux Jeux olympiques d’été de 1968 dans la catégorie des 82,5-90kg

 Aujourd’hui, Kangasniemi ne peut que se lamenter sur ses erreurs : « Je donnerais toutes mes médailles pour récupérer la santé. » Il ajoute en guise d’avertissement à l’intention de ses cadets : « On ne se rend pas compte des dangers encourus. Les progrès réalisés sont tellement foudroyants, obtenus Si facilement que la notion de risque n’apparaît jamais ou trop tard. Je le sais bien, moi qui en ai subi – et continue d’en subir – toutes les conséquences. » [L’Equipe, 18.05.1977]

Épilogue : Après trente ans de rééducation, le Finlandais a vaincu la paraplégie puisqu’en 1997 il a fait les championnats du monde vétérans au Canada.

 1978  – CYCLISME – Pierre Chany (FRA) : « Des carrières abrégées par douzaines »

Témoignage du journaliste Pierre Chany : « Au cours de la saison écoulée (1978), plusieurs coureurs ont cessé brutalement leur activité, à l’encontre d’une tradition qui voyait les routiers déclinants prendre leur retraite à la fin de l’année seulement. Parmi eux, Eddy Merckx, le plus grand, le plus titré, le plus admirable, qui ne parvenait plus à suivre des coureurs de troisième zone. Son état de santé est préoccupant. Mais de quel mal souffre-t-il ? Peut-être le dira-t-on un jour, comme vient de nous le dire Bernard Thévenet. Dans le même temps, Freddy Maertens a sombré. Un membre de son entourage affirme que le déclin accéléré de Merckx l’a traumatisé, qu’il a changé aussitôt de méthode, que son psychisme a flanché et que, pardi ! Les résultats s’en ressentent.

Les exemples de carrières abrégées se comptent maintenant par douzaines : le Danois Leif Mortensen, un bel athlète pourtant, contraint de renoncer parce que l’usage de la cortisone l’avait conduit à un état de dégradation extrême ; Alain Santy qui accusait naguère les “soigneurs” de l’avoir anéanti alors que chacun voyait en lui un futur grand champion; et beaucoup d’autres encore, parmi lesquels des malheureux atteints d’impuissance sexuelle, heureusement souvent temporaire. » [Chany P. .- 17 coureurs morts de crise cardiaque .- Paris-Match, 1978, n° 1539, 26 novembre, pp 93 et 102]

 1979 – Pr Philippe Réville (FRA) : « Le muscle en prend un coup »

Communication au colloque ‘’Poids et sport’’ du Pr Philippe Réville, endocrinologue à Strasbourg : « Le catabolisme musculaire est aggravé par :

  • la sédentarité,
  • l’involution sénile,
  • les hormones, en particulier la cortisone.

La cortisolémie influence le catabolisme musculaire et dans la corticothérapie prolongée, il y a déperdition de la masse musculaire. Les biopsies osseuses permettent de façon précise de déterminer les zones de formation osseuse et les zones de résorption. Il y a un rapport assez constant entre la formation et la destruction. Chez les sujets sous thérapeutique cortisonique prolongée, les zones de résorption sont plus importantes que les zones de formation osseuse. La cortisone a donc un effet ostéolytique et catabolique. C’est pourquoi, il est curieux de trouver des articles mentionnant des dopages à la cortisone.

Cette hormone qui stimule l’appétit, a peut-être un effet antifatigue et euphorisant, mais il y a un grand nombre d’arguments contre ce dopage. Dans un récent rapport, l’Académie de Médecine les a résumés. Donner de la cortisone est inutile parce qu’à l’effort on en fabrique beaucoup et plus d’ailleurs qu’à la dose ingérée, que ce dopage à la cortisone est illogique parce qu’il met au repos la sécrétion prolongée de l’ACTH et, qu’enfin, cet effet est dangereux parce que, même s’il est euphorisant, le catabolisme protidique est important et si l’utilisation est prolongée ce catabolisme va diminuer les masses musculaires. » [Réville Ph. .- Hormone et poids – communication au colloque ‘Poids et Sport le 28 janvier 1979’ .- Neuilly-sur-Seine (92), éd. Labo Servier, 1979, 1er vol. .- 67 p (pp 6-30)]

 1979  – BASKETBALL – Rich Nichols (USA) : « La cortisone expose au désastre »

 Texte de Rich Nichols : « Le jeu doit continuer. Les athlètes professionnels reçoivent des centaines de milliers de dollars pour se produire. L’attitude qui prévaut est qu’ils doivent concourir. Ce n’est pas trop que de demander à ces athlètes de jouer en ayant mal. Les antidouleurs sont disponibles, tous sont tranquillement encouragés à les utiliser. De nombreux athlètes professionnels prennent régulièrement des anti-inflammatoires et des anesthésiants locaux. Dans certains cas, les médecins de l’équipe administrent de la cortisone – des mixtures anesthésiantes qui permettent aux athlètes de se produire malgré la présence d’une grave blessure -. La pression pour qu’ils jouent tout en étant blessé est énorme et souvent irrésistible. Même des concurrents à principes, fermement convaincus que s’il faut prendre des médicaments, la compétition n’est plus valable, succombent parfois. Les médicaments vont endormir le mal. Malheureusement, effacer la douleur par des médicaments afin de faciliter la performance athlétique, aggrave la blessure préexistante. Il est surprenant néanmoins que peu d’athlètes professionnels aient poursuivi en justice leurs médecins pour leur avoir négligemment administré le produit fatal. Bill Walton est une exception à signaler. En 1978, Bill Walton, le fabuleux centre des NBA’s Portland Trail Blazers, aux cheveux et à la barbe rousse, qui ne se nourrissait que de produits naturels, mena son équipe au sommet du basket-ball professionnel.

2015-bill-walton

Bill Walton

Champion NBA en 1977 avec les Trail Blazers de Portland et en 1986 avec les Celtics de Boston. Il est introduit au Hall of Fame en 1993.

Mais sa saison de rêve devait se terminer par une accumulation de blessures désastreuses. Fin février, il se blessa à la cheville gauche. Le médecin de l’équipe, le Dr Bob Cook, annonça que Walton serait de retour dans les 10 jours. Mais, 30 jours plus tard, Walton pouvait à peine marcher. D’autres joueurs indispensables étant blessés Walton devait jouer coûte que coûte les finales. Malgré sa grande douleur, il essaya de courir sur son pied blessé. A contrecœur, il prit des médicaments pour soulager sa douleur. Walton fut convaincu que sans Butazolidine® (AINS) et/ou Décadron® (corticoïde) (l’un et l’autre mélangés à des anesthésiants de la douleur sont extrêmement efficaces pour masquer le mal), il ne serait pas capable de jouer. Malgré les drogues, la douleur persista. Mais les finales approchaient. Walton, tant bien que mal, joua la première partie d’une série contre les Seattle Super Sonics. En dépit d’une douleur infernale dans la cheville gauche, Walton conduisit les Blazers à la victoire. 

Le lendemain, marcher était devenu un véritable chemin de croix, courir était impossible. La seconde partie n’avait lieu que deux jours plus tard. Comment Walton pourrait-il être prêt à jouer. Le docteur Bob Cook informa Walton qu’une piqûre de xylocaïne, mêlée à des doses de Décadron® (corticoïdes) et de Butazolidine®  (AINS) déjà utilisées, calmerait la douleur. Les Blazers gagnèrent la seconde partie, mais ce faisant ils perdirent leur meilleur atout : Walton. Le matin après la partie, Cook fit de nouvelles radios. Cette fois, les résultats furent positifs : Walton souffrait d’une fracture de la cheville gauche.

Walton avait joué beaucoup trop longtemps sur son pied blessé. Il pensait que les antidouleurs et les médicaments type cortisone prescrits par Cook contribueraient à réduire la blessure. L’action en justice fut le seul moyen de réparer la conduite thérapeutique apparemment “négligente” de Cook. Walton poursuivit Cook devant les tribunaux ainsi que 20 médecins anonymes de la Clinique Orthopédique de la ville d’Oregon. Dans un procès intenté le 20 mars 1980, la star de la NBA (National Basketball Association) déclara que bien qu’il se soit plaint continuellement de douleurs et de gêne, Cook avait fait preuve de négligence en ne diagnostiquant pas une fracture et lui a prescrit des doses orales et des injections d’un médicament consistant en de la Butazolidine® (AINS), du Décadron® (corticoïde) et de la xylocaïne et l’a encouragé à s’appuyer sur son pied. De plus, déclara Walton, le 21 avril 1979, après avoir omis de diagnostiquer la fracture, Cook lui a administré deux injections du mélange déjà mentionné afin de le faire jouer. John Bassett, l’avoué de Walton à qui on demandait récemment si les injections de xylocaïne couplées à l’ingestion orale de Décadron®  (corticoïde) et de Butazolidine®  (AINS) avaient empêché Walton de ressentir sa blessure en cours de jeu, répondit : “Personne n’en est absolument certain. Mais d’après l’expert médical, la lésion osseuse a été aggravée par l’utilisation de Décadron® et de xylocaïne, du fait que des tensions ont pu être exercées sur l’os déjà abîmé, à tel point qu’elles ont finit par fracturer complètement l’os.

Bassett affirme que même avant la blessure qui le rendra peut-être infirme, la star des Blazers s’était vu prescrire par les médecins de l’équipe des substances agissant sur la douleur, en de nombreuses occasions. A chaque fois, les résultats furent désastreux. “Il termina avec une jambe cassée en 1976 et un scaphoïde tarsien fracturé en 1979, ajoute Bassett, il n’y a aucun doute que les médicaments ont contribué au dommage physique qui mettra peut-être fin à la carrière de Walton“. Il est à remarquer que Walton n’a pas poursuivi les Portland Trail Blazers. Il a poursuivi les médecins de l’équipe, indépendamment responsables. Walton, à l’origine, réclamait cinq millions de dollars pour perte de salaire et frais médicaux. Cinq jours avant le procès, Walton et Cook réglèrent la question en dehors de la Cour. La décision d’utiliser des médicaments n’était malheureusement pas inhabituelle, mais sa réaction était nouvelle. Il s’est défendu. Une cour de justice a été son terrain de bataille. En un sens, son combat n’était pas dirigé contre un médecin mais contre une mentalité qui exige que les athlètes se sacrifient pour le plaisir de la foule. » [Rich Nichols, Runner’s World, 1984, 19, n° 3, p 96]

 1986 –  Fait chuter la testostérone

« Les corticoïdes au long cours réduisent les taux plasmatiques de testostérone de moitié chez les hommes dans leur sixième décade par le biais d’une altération de la libération hypothalamique des releasing hormones des gonadotrophines. » [Ann. of Int Med., 1986, 104, 5, pp 648-651]

 1988 –  Diminution de la force mécanique du tendon

« Lors de traitements prolongés ou d’injections répétées de corticoïdes (dose équivalente à trois injections ou un traitement per os d’une durée supérieure à un mois), on a pu constater une diminution de la force mécanique du tendon et de son poids, ainsi qu’une altération de la fibrogenèse. En corollaire, on a décrit des ruptures tendineuses après l’administration per os de 30 mg de Cortancyl® (corticoïde) pendant 15 jours ou trois semaines. Toutes ces ruptures tendineuses ont porté sur les tendons d’Achille ou rotuliens, et ce alors que les efforts fournis étaient minimes. Il semble pour cette raison justifié de contre-indiquer toute activité sportive lors d’une corticothérapie prolongée. » [Le Quotidien du Médecin, 11.04.1988]

 1989 –  NATATION – Catherine Plewinski  (FRA) : « L’apparence d’un ballon de foot »

« Catherine Plewinski, championne de France du 100 m papillon : normal, penserez-vous. Au retour d’une randonnée de ski de fond d’une vingtaine de kilomètres au mois de mai, le visage de Catherine arbore un coup de soleil géant. Ordonnance : pommade à la cortisone. En appliquant celle-ci, Catherine passe sa main sur le lobe percé d’une de ses oreilles qui suppure depuis quelques temps. Dans les heures qui suivent, la face de la nageuse prend l’aspect d’un ballon de foot : une infection ultrarapide. Hospitalisation de nuit, d’urgence – on la place sous perfusion ! – et le verdict tombe enfin : staphylocoque. Et non, comme on l’avait cru longtemps, un virus contracté aux Antilles, voire la « dingue », autre mal tropical qui a la particularité de développer des ganglions. Quelques jours de traitement approprié et l’affaire est réglée. Mais on a cru un instant à la septicémie et c’est une fille affaiblie, psychologiquement lasse, qui quitte l’hôpital. » [Le Figaro, 21.07.1989]

Le Grand Bêtisier des corticoïdes – L’Equipe nous en raconte une bien belle !

Par défaut

Afin de démontrer que les corticos injectables administrés dans l’environnement d’un match ne sont pas sans dangers pour le joueur, le quotidien du sport nous raconte une énorme fable !

L’histoire remonte à la finale du Mondial 1998 entre la France et le Brésil. L’attaquant vedette de la Seleçao, Ronaldo, aurait quitté le terrain en plein match pour avoir fait une crise d’épilepsie provoquée par des infiltrations de corticoïdes avant le début de la rencontre.

 

lquipe

L’Equipe, samedi 8 octobre 2016

 

 Rappelons les faits. Ronaldo est victime d’une crise épileptiforme avec perte de connaissance sept heurs avant la finale du Mondial au Stade de France, le 12 juillet 1998. Citant des « sources liées à l’encadrement des Auriverde », O Globo – le principal quotidien de Rio – mettait en cause « une réaction à une infiltration de cortisone associée à un anesthésique » (au genou droit). Il Fenomeno  passe une partie de l’après-midi en clinique pour examens médicaux (scanner cérébral…). Jusqu’à dix minutes du coup d’envoi, il ne figure pas sur la feuille de match. Au final, il va jouer toute la partie mais à un niveau inférieur, ne pesant qu’à de très rares occasions sur la défense tricolore. Il ne fait pas de crise d’épilepsie en plein match. Les spectateurs s’en souviendraient et cet évènement aurait provoqué un tsunami médiatique !

Pourquoi tant de faits erronés alors que Gilles Simon, le journaliste de l’Equipe qui a  signé l’article du 16 octobre 2016, était présent au Stade de France le 12 juillet 1998 ?

Deuxième interrogation : pourquoi aucun rectificatif le lendemain ? Trois hypothèses sont possibles :

1 – Les lecteurs du journal n’ayant pas regardé la finale France-Brésil du 12.07.1998 n’ont pas réagi ;

2 – Ces derniers ne lisant pas les pages consacrées aux corticos sont restés silencieux ;

3 – Prévenu du mastic, le rédacteur s’est abstenu de passer un addenda rétablissant la réalité des faits.

Maintenant, pour l’éternité, des journalistes compilateurs vont raconter cette fable. Merci L’Équipe !

 

En réalité, les AUT sont destinées à légaliser le dopage et sont surtout contraires à l’éthique médicale

Par défaut

Pourquoi la lutte antidopage hippique interdit-elle toutes les substances en considérant qu’un cheval malade ou blessé – le temps d’être soigné – reste au pré ou à l’écurie et ne peut reprendre la compétition que lorsqu’il n’est plus sous traitement et que les substances médicamenteuses ont été éliminées ?

Chez l’homme, dans le cadre d’une compétition, il est possible de prendre des produits dopants pour traiter des affections aussi banales que tendinites (infiltration de glucocorticoïdes), irritation bronchique, inflammation cutanée, etc.

 

soeurs-williams

Les sœurs Williams

 

Les sœurs Williams citées par les hackers ‘’russes’’ mais avec elles de nombreux autres sportifs ayant participés aux jeux de Rio en août dernier, sont ‘’dénoncés’’ comme ayant des autorisations d’usage à des fins thérapeutiques (AUT) permettant l’usage légal de corticoïdes lors des compétitions. En dehors des AUT, ces substances font partie de la liste rouge. Il y a une forte probabilité que les deux sisters des courts aient lu la biographie d’André Agassi « Open » parue en 2009 et comportant de nombreux passages où le King de Las Vegas explique en long et en large le soutien inestimable de ces substances, à la fois anti-inflammatoires puissantes et euphorisantes.

 

open

éditions Plon, 2009

 

A l’époque de la carrière d’Agassi les corticoïdes ne sont pas interdits ni recherchés par les instances du tennis, donc il n’est pas nécessaire d’obtenir des AUT. En 2004, l’Américain ne manque pas d’air pour glorifier la lutte antidopage sur les courts : « Une des choses que l’on peut dire, c’est que notre sport est à la pointe – ou l’un de ceux les plus à la pointe de la lutte contre le dopage. Je suis certain grâce aux contrôles antidopage de l’ATP que les performances de mes adversaires ne sont pas améliorées par des produits interdits. Je suis persuadé de jouer contre des gens clean. » [Associated Press, 13.01.2004]

 Agassi et le dopage – Un spécialiste des médications de soutien prohibées

 Une contamination accidentelle aux amphétamines

En novembre 2009, à l’occasion de la sortie de sa biographie ‘’Open’’, André Agassi, le lauréat de huit titres en Grand Chelem, fait des aveux a posteriori d’un contrôle positif à la métamphétamine, un stimulant, lors d’un tournoi en septembre 1997. L’ATP accepte « l’excuse-bidon » d’une contamination à son insu du joueur américain. Il n’a pas eu la moindre sanction ou même une simple réprimande.

Des injections de corticoïdes ‘’en rafale’’

 « La négociation tourne largement autour du coup de fouet, une injection de cortisone qui calme momentanément la douleur. Mais avant que le coup de fouet fasse effet, il provoque lui aussi ses propres souffrances. J’ai reçu une de ces piqûres il y a quelques jours, je serai donc capable de jouer ce soir. C’était la troisième injection cette année, la treizième de ma carrière et de loin la plus inquiétante. » (p 13)

« C’est à peine si je peux tenir un téléphone, alors une raquette ! Pourtant j’ai envie d’y aller (…) Et puis j’ai un titre à défendre. Je n’ai pas le choix. Juste avant de partir, Gil Reyes prend un rendez-vous chez un médecin réputé être le meilleur de Seattle, pour qu’il m’administre de la cortisone. L’injection fait de l’effet. Je débarque en Europe capable de remuer le poignet sans douleur. » (p 228)

« Au cours des derniers mois, Gil a durci ma préparation physique. Il m’a fait subir un régime de guerrier spartiate et je me sens affuté comme une lame de rasoir. J’ai aussi droit à une piqûre de cortisone, ma troisième de l’année. Il est recommandé de ne pas en dépasser quatre par an. Il y a des risques, préviennent les médecins. On ne connaît pas les conséquences à long terme de la cortisone sur la colonne vertébrale et le foie. Mais je m’en fous. Du moment que mon dos se tient à carreau. »  (p 467)

« Au premier jour, je joue contre le Roumain Andrei Pavel. Mon dos m’agrippe à la moitié du match, mais même sir je dois me tenir raide comme une baguette, j’arrive à me dégoter une victoire. Je demande à Darren Cahill de prendre les dispositions pour une injection de cortisone le lendemain. Malgré cette piqûre, je ne sais pas si j’arriverai à disputer mon prochain match » (p 483)

Au moment de sa retraite, Agassi – non sans humour – envisage d’appeler son futur chien Cortisone ! « Pour les enfants, la retraite est synonyme d’animal domestique. Nous leur avons promis, Stefanie Graff et moi, que lorsque je cesserai l’entraînement et que nous ne courrons plus à travers le monde, on achètera un chien. On pourrait peut-être l’appeler Cortisone. » (p 15)

Ce n’est pas sûr qu’il ait tenu sa promesse de donner le nom de cortisone à son cabot !

Dans les ouvrages médicaux sérieux respectant le serment d’Hippocrate, à aucun moment il n’est signalé dans les indications thérapeutiques de la cortisone qu’elle doit être absorbée ou injectée dans l’environnement immédiat de l’effort ou dans un but de performance.

Dès 1980, le Comité international olympique avait déjà ‘’injecté’’ le ver dans le fruit en tolérant les injections d’anesthésiques locaux ou de glucocorticoïdes « seulement dans le but de permettre à l’athlète de poursuivre la compétition ». En 1998, j’avais souligné dans la revue Sport et Vie cette carence du CIO et de sa commission d’analphabètes du corps.

 

justification

Sport et Vie, 1998, n° 48, mai-juin, p 27

POST-IT

 La comparaison avec la lutte antidopage exercée dans le sport hippique où la quasi-totalité des médications sont prohibées en compétition (je le répète : on peut et doit soigner les chevaux en dehors des courses) n’est pas hors sujet. Cette réglementation très stricte n’a qu’un but : préserver la santé des chevaux.

Cette différence d’objectif avec les hommes (AUT = autorisation de tricher et de se doper) montre bien que l’amélioration de la race humaine n’est pas la préoccupation du Comité international olympique.

Signalons que dès 1906, et même avant, le leitmotiv de la Société des courses se concentre sur la santé des quadrupèdes. C’est ce que nous explique le journaliste Fernand Bidault dans La Vie au Grand Air : « L’amélioration de la race chevaline nous intéresse beaucoup plus qu’une amélioration semblable de la race humaine. La constatation d’un record suffit à notre bonheur. Et il est logique que la descendance des athlètes à deux pieds ne soit pour nous l’objet d’aucune étude, puisque nous n’y attachons aucun prix. » [La Vie au Grand Air, 1906, n° 423, 27 octobre, p 790]

 Les chevaux mieux soignés que les hommes

Gustave Barrier (FRA), inspecteur général des Ecoles vétérinaires : « Il faut combattre le ‘’doping’’, non tant parce que c’est une manœuvre déloyale qui fausse le résultat des courses, que parce qu’il constitue un danger pour le cheval qui le subit, et porte atteinte à l’intégrité de ses aptitudes génésiques, s’il doit être ultérieurement utilisé comme reproducteur. » [Congrès hippique, 19.06.1913]

Jean-Philippe Bouchard (FRA), journaliste à France Football : « Si la prise de conscience – récente et médiatique – au sujet du dopage s’amplifie, le monde du sport va se trouver confronté à une alternative qu’il n’avait pas réussi à ignorer jusque-là : bannir réellement le dopage ou l’officialiser. Refuser le dopage, comme tous les bons sentiments l’exigent, c’est d’abord tenter de le détecter. C’est loin d’être le cas. Aujourd’hui, les moyens de détection chez les chevaux sont plus importants que chez les hommes. » [Marianne, 10.11.1997]

Dr Stanislas Burstin (FRA), médecin fédéral de la FFF : « On est frappé de stupeur à l’idée de l’inertie face au dopage, des athlètes, comparée à la sévérité des mesures et à l’efficacité du contrôle des courses de chevaux. » [France Football Officiel, 26.07.1960]

 Daniel Courtot (FRA), laboratoire de toxicologie de l’école vétérinaire de Lyon : « Faire effectuer à un cheval une épreuve alors qu’il serait dans l’impossibilité de concourir sans l’aide d’anesthésiques locaux pour masquer une boiterie, est un procédé dangereux. En effet, l’origine de cette boiterie peut être une lésion dont la gravité ne peut que s’accroître à la suite d’un effort physique. » [Daniel Courtot. – le dopage chez le cheval. – Paris, éd. André Leson, 1977. – 59 p (p 33)]

Dr Georges Maylin (USA), professeur associé de toxicologie à l’Université Cornell (USA) : « Les hommes serviraient la plupart du temps de “cobayes” dans l’utilisation des drogues avant qu’elles ne deviennent d’un usage courant dans les courses hippiques. » [L’Équipe, 03.01.1981]

 

cheval

Test de la fonction cardiorespiratoire chez un cheval à l’effort