Dès 1922, la pub booste la médicalisation des “gros bras” : ces deux documents en témoignent
En ce qui concerne les ‘’gros bras’’ présents en 2017 sur la plus haute marche de la boîte, j’ai retrouvé une réclame de 1922 intitulée « La pharmacie des culturistes » publiée dans l’ouvrage du Dr Marcel Didier « Culture physique et médecine ».
Même si les produits présentés n’ont rien à voir avec les stéroïdes anabolisants, testostérone en tête, l’hormone de croissance ou l’EPO, ils démontrent que la culture de la médicalisation de la performance n’est pas récente.
Dopage : le culturisme sur la plus haute marche du bilan des contrôles de l’AMA
Alors que dans le bilan des contrôles positifs publié par l’AMA le 19 décembre 2019, classant les spécialités sportives où le plus grand nombre de violations des règles antidopage a été constaté sont le bodybuilding suivi de l’athlétisme et du cyclisme, un podium sans surprise.
Le quotidien sportif nous l’a fait à l’envers. Ses journalistes s’acharnent sur Alberto Salazar, triple vainqueur du marathon de New York au début des années 1980, mais surtout coach d’une structure d’entraînement top niveau – Nike Oregon Project – qui abrite en son sain la star des pistes d’athlétisme, le Britannique Mo Farah, lui-même quadruple champion olympique 2008-2012 (5 000 m et 10 000 m).
Un complément expérimental à base de L-Carnitine
En effet, à plusieurs reprises, les plumitifs de L’Equipe s’en sont pris aux thérapeutiques borderline du natif de La Havane et à son groupe d’athlètes. Par exemple, dans l’édition du 27 février dernier : « Le rapport de l’USADA, obtenu par le groupe de hackers russes Fancy Bears, indique que le coach abusait de médicaments sur ordonnance et administrait un complément expérimental à base de L-Carnitine, un acide aminé présent dans le corps. Le journal affirme avoir vu des documents montrant que Salazar avait administré ce produit par injectionsà Mo Farah et à une demi-douzaine de coureurs américains et que l’USADA avait conclu que ces traitements avaient « presque certainement » enfreint les règles antidopage. »
L’Equipe, 27 février 2017
Or, par un effet pendulaire étonnant, le journal créé par Jacques Goddet le 28 février 1946 – il y a 71 ans – a publié de 1987 à 1992 plusieurs publicités sur la fameuse L.Carnitine.
Dépasser vos limites et améliorez vos perfs de 10%
Des slogans ne laissaient aucun doute sur la finalité du message : « Vous voulez dépasser vos limites ? Faites le plein d’énergie avec la L.Carnitine, la vitamine des grands sportifs américains ».
Autres réclames stimulantes : « Permet aux sportifs :
– D’augmenter leur endurance,
– D’améliorer leurs performances de 10% [NDLA : l’EPO, selon la plupart des experts, booste le rendement de 6 à 12%]
– D’éliminer les crampes,
– De faciliter la récupération,
– De brûler les graisses »
Ajoutons qu’en pleine affaire Pedro Delgado (vainqueur du Tour de France 1988 malgré – en cours d’épreuve – un contrôle positif au probénécide interdit officiellement depuis le début de l’année 1987), L’Equipe passe des publicités pour des lecteurs cyclistes : « Roulez à la L.Carnitine ».
Rappelons que même si la Carnitine ne figure pas dans la liste rouge de l’AMA ni dans le programme de surveillance, elle répond parfaitement à la définition d’une conduite dopante puisqu’elle est consommée dans le seul but de performer et non de soigner une affection.
Publicité publiée pendant l’affaire Pedro Delgado, L’Equipe, 22 juillet 1988