

FOOTBALL – La FIFA et l’UEFA nous bassinent depuis des lustres sur l’inefficacité du dopage sur les terrains de foot et que la culture de cette dérive des drogues de la performance est inconnue des joueurs Avec de tels postulats infondés, les instances du ballon rond sont quasi certaines d’obtenir haut la main la médaille d’or de l’hypocrisie et du gros mensonge
FOOTBALL – Sepp Blatter et Michel Platini ayant reçu un carton rouge pour plusieurs années, on espère sans trop y croire que la lutte antidopage dans le football va être enfin crédible. Sauf que si les responsables des commissions médicales respectives de la FIFA et de l’UEFA restent en place, on est sûr que rien ne va changer.
A tous ceux qui me critiquent depuis des lustres sans le moindre argument étayé par des faits ou des chiffres (établis par des structures indépendantes du monde du sport), mis à part d’affirmer sans avoir débattu une seule fois avec moi, que je suis au choix : aigri, jaloux, envieux, ou que je n’aime pas le sport ( ! ) et les sportifs – notamment les cyclistes professionnels – que le dopage est mon fonds de commerce … A tous ces « sans argument » je dis : continuez, cela me stimule !
Pour tous les adeptes des drogues de la performance qui pensent à tort qu’en me critiquant, ils vont me freiner, je leur conseille de lire la punchline de Paul Bourrillon, de Marmande, champion du monde de vitesse 1893 : « Il vaut mieux avoir beaucoup d’ennemis que trop d’amis. Le nombre de gens hostiles constitue, sans aucun doute, le thermomètre parfait du succès. Plus ils sont nombreux, plus vous avez de valeur. » [La Vie au Grand Air, 01.02.1913]
Paul Bourrillon
Sans le recours à des analyses sophistiquées, les dopés sont faciles à reconnaître. Il suffit de lire ou d’écouter leurs arguments :
Les adeptes des drogues de la performance en ont marre d’être stigmatisés de longue date et donc contre-attaquent en critiquant à tout va ceux qui révèlent le dopage (les pompiers) et non les tricheurs (les pyromanes). Ainsi, ils affirment pour les décrédibiliser que les tenants de l’éthique sportive « ont pour fonds de commerce de passer dans les médias ou de publier des ouvrages sur le sujet qui fâche ».
Afin d’éclairer leur lanterne vacillante, à tous ces partisans du statu quo on rappellera que dès 1979, le comité des ministres du Conseil d’ l’Europe – conscient du manque à gagner – avait recommandé de « venir en aide » à ceux qui étaient dans le camp de l’antidopage.
Mamadou Sakho
En dehors du fait que la substance incriminée, l’higénamine, était bien interdite et connue comme telle avant le 17 mars date du contrôle de l’international français lors du match de Ligue Europa Liverpool-Manchester United, on comprend difficilement la mansuétude de l’UEFA.
Sauf si l’on sait que la règle intangible des Fédérations internationales est de montrer qu’elles luttent avec pugnacité contre le fléau (urine et sang testés, passeport biologique, localisation des joueurs pour contrôle inopiné, horaires nocturnes des tests sur des joueurs ciblés) tout en espérant surtout n’attraper personne pour ne pas écorner l’image de leur sport.
Si Sakho avait été contrôlé positif à l’higénamine (un bêtastimulant) dans le championnat de France de Ligue 1, un procès-verbal du labo de Châtenay-Malabry (92) aurait été transmis à la fédé dirigée par Noël Le Graet engageant ainsi une procédure par sa commission antidopage. Si cette dernière avait rendu un jugement de relaxe acceptant les explications « d’ignorance » du joueur, nul doute que l’AFLD (Agence française de lutte antidopage) – le gendarme placé au-dessus des fédérations, responsable de la traque des tricheurs sur le sol français, aurait repris en mains le dossier Sakho avec, au bout de la procédure, une suspension de plusieurs mois pour le défenseur de Liverpool. Dans le cas présent du contrôle de Sakho lors d’un match de Ligue Europa c’est à l’AMA ou à la FIFA d’assumer le rôle de gendarme indépendant reprenant le dossier afin de vérifier que l’UEFA a joué pleinement son rôle de garant de l’éthique. Il est peu probable que ces deux instances aient réellement envie d’entrer en conflit contre la forte confédération européenne.
Le ”super gendarme” français
Pour bien comprendre la mansuétude anormale de l’UEFA, il faut signaler que depuis 2004, le Code mondial antidopage stipule que la liste des interdictions comprend des substances spécifiées, notamment parmi de nombreux stimulants tels que l’higénamine, susceptibles d’entraîner une violation ‘’non intentionnelle’’ des règlements antidopage, compte tenu de leur présence fréquente dans des compléments alimentaires.
Le Code prévoit que toutes les substances interdites – à l’exception des substances comprises dans les catégories lourdes comme les agents anabolisants (testostérone, stéroïdes) et les hormones (EPO, hormone de croissance), ainsi que les stimulants forts (amphets, cocaïne…) deviennent des-« substances spécifiées» à des fins de sanction. Cela signifie que quand un sportif peut établir comment une substance spécifiée est entrée dans son corps ou est entrée en sa possession, et que cette substance spécifiée n’était pas destinée à améliorer sa performance sportive,-la sanction peut être réduite au minimum à une réprimande sans période de suspension, et au maximum à une suspension de deux ans. Il est important de noter que ces substances spécifiées, telles que définies dans le Code, ne sont pas nécessairement des agents dopants moins importants que les autres substances interdites (par exemple, un stimulant listé comme étant une substance spécifiée pourrait être efficace pour un sportif en compétition).
Pour cette raison, un sportif qui ne satisfait pas aux critères de réduction pourrait se voir imposer une suspension pouvant aller jusqu’à 4 ans en cas de circonstances aggravantes. Cependant, il existe de plus grandes probabilités que les substances spécifiées, par opposition aux autres substances interdites, pussent faire l’objet d’explications crédibles non liées au dopage. Précisons que l’higénamine (un bêtastimulant) améliore les performances de vista du footballeur (accélération instantanée, détente verticale, etc.) et qu’à ce titre fait partie de la liste rouge.
Camouflée dans une préparation commercialisée dans la catégorie des brûleurs de graisse, elle (l’higénamine) permet au joueur et à ses avocats d’affirmer ignorer la présence de cette molécule indésirable, de jouer l’ingénu et de faire ainsi croire la main sur le cœur n’avoir jamais voulu tricher. Ces dernières années, de nombreux sportifs, afin d’éviter une longue suspension – voire d’espérer une simple amende – se sont défendus avec l’excuse du brûleur de graisse contaminé.
Cette modulation des sanctions est de la responsabilité de la Fédération internationale de football qui n’a signé le Code mondial antidopage le 21 mai 2004 qu’à la condition impérative qu’il y ait, suivant le type de substances, une graduation des poursuites disciplinaires. Les footballeurs qui ne sont pas tous idiots ont compris qu’on pouvait se doper avec des substances efficaces (certains stimulants dans la section des spécifiés) et qu’ensuite avec l’aide d’un bon avocat, on pouvait jouer les naïfs en expliquant que le produit en cause dans le test positif n’était pas listé sur le code de l’AMA ni précisé en toutes lettres sur la boîte.
Noël Le Graet
Du côté français, je ne suis pas sûr que Noël Le Graet soit la bonne personne pour faire peur aux dopés du ballon rond. Avec son long passé dans le milieu du foot [président de l’En Avant de Guingamp (1972-1991 et 2002-2011) et président de la Ligue nationale de football depuis 2011], il a quand même osé affirmer sur la radio RTL Sports : « Le dopage, je n’y crois pas en football ».
Rappelons que la responsabilité d’un dirigeant commence avec le refus de savoir.
Ajoutons que c’est la compétition qui génère le dopage et ce d’autant plus qu’elle est médiatisée. Il n’y a aucune raison que les footballeurs soient épargnés par cette dérive ou alors il faut imaginer qu’ils sont recrutés chez les enfants de chœur alors que les autres sportifs (athlètes, cyclistes, haltérophiles, footballeurs américains, hockeyeurs) le sont chez les malfrats.
L’Equipe, 13 juillet 2016 – Noël Le Graet n’a jamais été un grand pourfendeur du dopage
Sur la demande de la Fédération internationale de football, le Code mondial antidopage distingue des substances lourdes (dénommées ‘’non spécifiées’’) dont le tarif minimum est de deux ans quel que soit l’excuse du joueur et de son avocat et des substances dites ‘’spécifiées’’ (moins puissantes) qui donnent la possibilité aux sportifs d’invoquer une absorption par ignorance sans l’intention d’améliorer leurs performances.
Avec les stimulants spécifiés, la sanction peut être réduite (au minimum un avertissement et au maximum deux ans pleins).
Depuis, les sportifs jouent sur cette distinction pour se doper avec un stimulant spécifié et grâce à un bon avocat s’en tirer avec un simple avertissement, voire être blanchi complètement.